Juin 2011, c’est le moment que j’ai choisi pour intégrer le Conseil d’Administration de l’asbl que mon mari a mise sur pied. Je n’y entre pas d’abord par conviction ou par amour du prochain, j’y entre parce que mon mari semble avoir de graves problèmes de santé. La fatigue qu’entraîne l’administration de cette nouvelle asbl, ses soucis de santé et son temps plein exercé ailleurs sont difficilement tenables… J’accepte donc de prendre une partie de ce poids sur moi. Je rentre dans ce conseil d’administration comme  » une petite main « , je m’attends à devoir réaliser certaines tâches administratives (paiement des salaires, envoi de courriers…), rien d’autre. Mon arrivée occasionne une restructuration et une professionnalisation du CA, mon mari sort du conseil d’administration, d’autres y entrent et il faut nommer un nouvel administrateur délégué. Je prie…
Lors de la réunion d’élection, je reste silencieuse attendant que le vote ait lieu, ne défendant pas ma candidature mais ne m’opposant pas non plus. Je laisse la volonté du Seigneur s’accomplir tout en lui suggérant tout de même de bien vérifier si quelqu’un d’autre ne ferait pas mieux l’affaire.

C’est moi qui suis élue…
J’interviens les deux premiers mois comme administratrice. Le travail au quotidien montre que sans la présence d’une direction sur le terrain, l’activité risque de sombrer. Il faut nommer un directeur et un nouveau CA est organisé.
Je prie encore…Et bien que je veuille à tout prix rester dans la confiance, je panique à l’idée que cela puisse à nouveau être moi. Et c’est moi qui suis effectivement désignée.

Depuis, je travaille comme directrice de cette petite asbl qui s’occupe de personnes adultes dites  » à double diagnostic « . Elles souffrent à la fois de déficience intellectuelle sévère et de troubles psychiatriques associés (psychose, autisme, troubles du comportement). Ce sont des gens dont personne ne veut, ils ne parviennent pas à trouver de place dans les hôpitaux psychiatriques pour bénéficier de soins (à cause du handicap) pas plus qu’ils n’arrivent à en trouver dans les lieux sensés prendre en charge le handicap (à cause de la maladie mentale). La plupart du temps, ces adultes très très abîmés restent en famille, à présenter des symptômes envahissants (cris, circulation, automutilations, agressions, jet d’objet…).

Je suis mandatée par mon CA pour augmenter le nombre de résidents pouvant être accueillis dans notre centre de jour et mettre sur pied 8 ateliers par jour ! Sans un euro ! L’asbl est pauvre, très pauvre, il y a tout juste de quoi payer les salaires et les charges. Rien de plus, rien de moins. Avec cette pauvreté supplémentaire que j’ai tout à apprendre, j’ai été élue directrice sans aucune compétence dans le registre du  » management  » et je ne connais rien quant à la multitude de démarches que je dois réaliser. Je suis juste psychologue depuis presque 20 ans…Il n’en reste pas moins qu’en matière de direction, je n’y connais rien !
Tous les matins, j’en suis malade…malade de stress, j’ai des crampes et des nausées avant d’aller travailler. En déposant ma fille à l’école, je prends chaque fois 5 min pour entrer dans l’église devant son école et m’agenouiller devant mon Seigneur pour lui redire mon  » oui « , de tout mon cœur, déposant par la même occasion mes pauvretés et inquiétudes.

Nous décidons, un éducateur et moi, d’organiser parmi tous ces ateliers à « construire », un atelier « jus de pomme ». Il a chez lui une vieille presse en bois, je me charge des pommes et des bouteilles.
Je me mets en prière, confiant au Seigneur cet atelier et lui demandant de me donner des bouteilles. J’envoie un mail à tous mes contacts et reçois le lendemain un don de 100 bouteilles neuves et de 100 couvercles !!! Merci Seigneur !
Presqu’immédiatement, le stress me saisit…me voilà avec une presse, 100 bouteilles, 100 capuchons et pas une pomme !
J’aurai bel air si je n’arrive pas à faire de jus. Seigneur, Jésus, j’ai oublié de te demander les pommes… !!! Les pommes ne tardent pas non plus à arriver, je reçois l’autorisation d’aller cueillir tous les fruits d’un verger, ce qui me permet au passage d’organiser un atelier cueillette. Chaque semaine, nous cueillons et nous pressons, avec nos pauvres des pauvres qui n’avancent pas vite dans l’exercice de presser les pommes si bien qu’il faut que je transporte les centaines de kilos restant afin qu’on me les presse. Nous arrivons tant bien que mal à presser l’équivalent de 25 litres, la presse industrielle me permet d’en obtenir 100. Avec ces 125 bouteilles se profile pour moi l’espoir de pouvoir vendre et de récolter quelques sous pour nourrir davantage en matériel mes autres ateliers. Un bénéfice d’une petite centaine d’euros est escompté.

Puis vient la session de Roger Paulin 2011, session dédiée à l’amour du père où il parle beaucoup de Moïse…et glisse au détour d’un enseignement qu’il connaît une dame qui a nommé le Seigneur directeur de son entreprise et qui est bénie depuis…
L’idée me paraît lumineuse !! Tout de suite, je bénis le Seigneur pour cette idée que je n’avais pas eue et lui confie mon asbl. Le soir même, je recommence et prend davantage de temps. De tout mon cœur, je convoque les anges, les saints et la vierge Marie que je prends à témoin de cette nouvelle élection : je nomme Jésus directeur de mon asbl… ! Je prends une parole et tombe sur un petit pain que je n’avais jamais pris, bien que j’aie mes  » petits pains de la parole  » depuis 1994 :  » Vous n’avez qu’un directeur, le Christ  » (MT23,10)!!! Je sautille de joie de savoir mon asbl dans de si bonnes mains, je rends grâce pour la précision de la réponse…Me voici soulagée d’un lourd fardeau et celui qui le porte désormais peut bien plus que moi ! Gloire à Dieu… !

La semaine qui suit la session du père Paulin est celle où je dois, avec deux de mes collègues, présenter notre asbl à un concours visant à favoriser les projets pilotes.
Mes collègues m’ont demandé de pouvoir emporter du jus de pomme pour attirer vers notre stand et obtenir plus de votes. Mon précieux jus ! Ma seule source de rentrée pour faire mes ateliers ! Je décide d’en donner 10, me ravise pour 20, me ravise une dernière fois pour ne plus changer d’avis, je cède 30 bouteilles. 30 bouteilles que je ne pourrai pas vendre mais avec lesquelles j’espère obtenir des votes.
Finalement, le prix du jury s’élève à 5000€, cela vaut la peine de tenter le coup.
Mes collègues et moi montons le stand…J’ai beaucoup prié. Prié que le Seigneur m’accorde la grâce de ne pas dire d’âneries en présentant le projet, prié pour gagner aussi ce prix de 5000€ que décerne le jury.

Mon collègue ouvre la première bouteille de jus, j’ouvre immédiatement après lui la seconde et nous commençons à présenter l’asbl aux gens qui s’approchent, leur servant à chaque fois un verre au passage. Notre troisième collègue est plus loin, elle parle sans s’encombrer de jus. Nous parlons, parlons, présentons et servons du jus pendant un temps qui me semble très long. Regardant ma montre, je me rends compte que voilà 3/4d’heure que nous sommes en train de parler et je ne vois pas de vidange.
Je demande alors à mon collègue s’il veut bien ne pas jeter les vidanges à la poubelle, précisant poliment que nous en aurons besoin l’année suivante pour refaire du jus.

Un peu piqué par mon procès d’intention, il me répond vivement :  » Mais je ne les jette pas ! « . Je m’étonne alors intérieurement puis vais vérifier sous la table, en dessous de la nappe s’il ne les y a pas cachées pour que tout reste joli…Pas une seule bouteille. Je me dirige alors vers la poubelle pour récupérer mes bouteilles vides, me disant que mon autre collègue les a jetées. Là non plus, je ne retrouve pas mes vidanges. Je reviens vers notre table et commence à compter…il y a exactement le même nombre de bouteilles qu’au départ ! 10 bouteilles sont encore dans le coffre de mon collègue, les 20 miennes sont sur la table et deux seulement sont ouvertes, les deux du départ !!! Elles ne sont même pas encore vides !!!!
Je cours alors au stand de mon mari qui présente aussi le projet de son institution et lui explique que Jésus est en train de multiplier mon jus de pomme, il me rejoint pour voir et je continue à servir devant lui avec ma première bouteille ! Il rit et moi aussi, et je continue à servir le cœur en joie, je bénis, je loue, je rends grâce, je ris de joie intérieurement avec le Seigneur, je jubile. Et je suis prise par une frénésie de servir du jus, j’appelle les gens de loin en leur proposant de goûter, les gens arrivent et moi je sers, je sers. Je sers les plus grands verres possibles et je propose aux gens de les servir même une seconde fois. Certains refusent un peu gênés et je les sers quand même leur disant :  » ne vous inquiétez pas, y en a ! « . Je me rends compte que le Seigneur est en train de réaliser le même prodige avec les biscuits ! J’ai acheté 7 paquets de biscuits et bien que les gens se servent en même temps qu’ils boivent, cette assiette semble toujours rester pleine. Mon collègue ne voit rien ou plutôt si, mais il ne voit qu’en partie !
Il voit bien qu’on sert du jus, il n’arrête pas de me demander si je veux qu’il aille chercher les bouteilles restantes dans son coffre. Il est donc bien conscient que nous n’arrêtons pas de servir du jus de pomme mais ce miracle de la multiplication semble lui échapper. Je me demande pourquoi…

Dans l’allégresse, j’ai servi du jus et des biscuits de 13 à 17h. J’avais 1 mètre de gobelets (100 verres)…Nous avons ouvert 7 bouteilles de jus de pomme en tout et pour tout.
J’ai bu un litre à moi toute seule, mon collègue deux verres. Nous avons donc bu 1,5 litre à nous deux et je suis rentrée avec le demi litre restant et les …23 autres bouteilles pleines ! Nous avons donc servi au public une centaine de verres de jus avec seulement 5 bouteilles, sans compter les fois où je les ai re-servis dans le même verre. De même pour mes biscuits, je suis rentrée avec 5 paquets fermés et des gens ont grignoté toute la journée autour de mon assiette !!! Gloire à Dieu !!

Le Seigneur n’a depuis ce jour cessé de tout multiplier. J’ai un budget hebdomadaire de 60€ pour faire les courses de l’asbl. Avec cette somme, je dois acheter les produits d’entretien, le papier toilette, les seaux, les raclettes, et la nourriture. Il me faut prévoir 36 repas par semaine ! Et si j’y arrivais déjà avec la grâce de Dieu au début, j’y arrive encore mieux depuis que les finances m’ont fait hurler au secours vers le ciel. La note à la caisse tourne aujourd’hui entre 40 et 50€ ! Entre 40 et 50 € pour faire 36 repas chauds et équilibrés, fournir les fruits et biscuits du matin, ceux du goûter, acheter tout ce dont l’asbl a besoin pour que les lieux soient propres et accueillants… ! Je n’en reviens à chaque fois pas !!!

Dans notre asbl, nos protégés peuvent se resservir 3 fois. Ils mangent à 9 et il y a tellement de restes que les éducateurs n’osent plus les donner aux poules, ils les congèlent ! A chaque fois que je reviens avec les nouvelles courses, je dois vider une partie du congélateur et donner aux poules des blocs de restes frigorifiés…

Ma machine à laver reçue en septembre 2011 a fonctionné un an avec les deux bidons de savons liquides reçus à la livraison et mon lave-vaisselle reçu le même jour ne parvient pas non plus à épuiser les cartons de tablettes de savon achetés au début !!!

Dieu est grand !
Mes ateliers ont pu être montés avec l’argent que des fondations (chrétiennes) me donnent spontanément. Par spontanément, je veux dire que je n’ai rien eu à faire…c’est elles qui m’ont appelées pour savoir si j’avais besoin d’argent.
J’ai rempli et rempli des appels à projets de fondations tout au court de l’année pour obtenir des fonds, je les ai tous ratés !! Ma population est tellement  » hors-normes  » que nous sortons de tous les critères des appels à projets. J’ai envoyé des courriers à toutes les entreprises de Belgique cotées en bourses pour obtenir de l’argent, je suis parvenue à récolter 200€ ! Les sous dont je dispose entrent sans que je n’aie rien à faire !! Et là encore, avec la grâce de Dieu, tout se multiplie…

Ainsi, par exemple, avec les 2500€ reçus pour monter l’atelier-ferme, j’avais prévu d’acheter deux ânes, deux chèvres, des licols et brosses, et un abri pour mettre les animaux. J’avais 800€ pour acheter mes ânes. Le vendeur touché par nos pauvres des pauvres m’en donne un et me vend l’autre pour 400€. Je veux acheter des chèvres, on m’en donne deux. J’achète des licols, brosses, longes, un magnifique abri pour les bêtes. Il me reste trop de sous. Je rachète alors en double du matériel de soin pour les animaux. Il me reste encore des sous. Je décide alors d’acheter une chèvre chère dans une chèvrerie réputée. Lorsque je reviens et que je recalcule le budget restant, il me reste plus de sous qu’il ne devrait y avoir. Je décide alors de me rendre au marché pour acheter 4 poules et à nouveau, le montant résiduel est plus élevé qu’il ne devrait. Pour terminer ce budget, j’ai du faire appel aux idées de l’équipe et confier à une collègue la tâche de dépenser les derniers euros…Merci, merci Seigneur !

Les sous multipliés sont seulement les sous données. Les sous ne se multiplient pas sur le compte de l’asbl. Elle reste terriblement pauvre et non subsidiée. Comme nos pauvres des pauvres rejetés de partout, nous vivons des ballotages. Les lieux de soins nous renvoient vers les instances subsidiant le handicap…où nous obtiendrons finalement un subside partiel de 1000€ par an pour toute l’asbl en 2013.
Autant dire que nous allons encore avoir furieusement besoin de Jésus !
Et j’ai la certitude que Dieu va le faire…Il est le directeur de cette asbl et pourvoit en toutes choses…Il s’en est trop mêlé que pour nous laisser tomber ! Par ailleurs, les attaques tant à l’extérieur qu’à l’intérieur ont été innombrables, survenant les unes après les autres, plus fortes les unes que les autres. Et si celui-là s’en mêle, c’est qu’il sait combien les projets du Seigneur sont grands pour ce lieu et pour ses enfants souffrants. Je m’en réjouis à l’avance !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Que le Seigneur soit béni, loué et glorifié, Lui qui pourvoit à tout, entend le cri de ses enfants et se soucie de nos vies jusque dans les moindres détails.

Amen !